Русская идея. Миросозерцание Достоевского - страница 18

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, как хотели наши националисты и империалисты. «Идея» России всегда обосновывалась пророчеством о будущем, а не тем, что есть, – да и не может быть иным мессианское сознание.

Исключительный интерес представляет письмо Фр. Баадера к министру народного просвещения гр. Уварову. Письмо называется «Mission de l’Eglise Russe dans la décadent du christianisme de l’occident». Оно впервые опубликовано в книге Е. Susini «Lettres inédites de Franz von Baader»[22]. Фр. Баадер очень замечательный и в свое время недостаточно оцененный мыслитель, наиболее близкий русской мысли. Он свободный католик и вместе с тем христианский теософ, возродивший интерес к Я. Беме, влиявший на Шеллинга последнего периода. Он имел большую симпатию к православной церкви и хотел сближения с ней. Он видел в России посредницу между Востоком и Западом. Баадер говорит многое близкое славянофилам и Вл. Соловьеву. Он решил ехать в Россию, куда его приглашал кн. Голицын. Но с ним случился русский анекдот. Его на границе арестовали и выслали из России. Баадер очень обиделся, писал об этом Александру I и кн. Голицыну. Но в Россию он так и не проник. В письме к Уварову он излагает свои замечательные мысли о миссии православной церкви в России. Письмо очень интересно нам тем, что обнаруживает на Западе мысли, близкие русской мысли. Под многим мог бы подписаться Хомяков. Русские много и часто несправедливо писали о разложении Запада, имея в виду, главным образом, антихристианский Запад. Но Баадер говорит о разложении и христианского Запада и ищет спасения Запада в России и православной церкви. Письмо, написанное по-французски, настолько интересно, что я приведу значительную часть его:

«S’il est un fait qui caractérise l’époque actuelle, c’est assurément ce mouvement irrésistible de l’Occident vers l’Orient. La Russie qui posséde en elle l’élément européen occidental aussi bien que l’élément oriental, doit, dans ce grand rapprochement, nécessairement jouer le rôle de l’intermédiaire qui arrêtera les funestes conséquences du choc. L’Eglise Russe de son côte a maintenant, si je ne me trompe, une tâche semblable à remplir à l’occasion de la décadence alarmante et scandaleuse du christianisme dans l’Occident; placée en face de la stagnation du christianisme dans l’Eglise Romaine et de sa dissolution dans l’Eglise protestante, elle reçoit, à mon avis, une mission intermédiaire qui est plus liéе qu’on ne le pense de l’ordinaire avec celle du pays auquel elle appartient. Qu’il me soit permis d’indiquer en peu de mots cette décadence du christianisme dans l’Occident et les causes pour lesquelles l’Eglise Russe s’étant maintenue à l’abri de cette décadence, est en êtat, par ci-même, d’exercer une influence libératrice sur l’Occident. Cette influence ne sera point polémique, elle résultera de son exemple et de sa doctrine solidement fondée sur la science religieuse dont le catholicisme romain est aussi loin par son principe destructif (par sa science hostile à la foi)… Les Français ont choisi et inoculé en eux comme principe constitutif le principe destructif de la révolution, de même que les philosophes ont adopté pour principe constituant le principe destructeur du doute cartésien, lequel dans le fond ne vaut pas mieux que le scepticisme… J’ai êtê le premier et je suis encore presque le seul, qui ait découvert cette erreur fondamentale de la philosophic moderne; j’ai démontré que tous les philosophes (sans en excepter Leibnitz) depuis Descartes et son successeur Spinoza, sont partis de ce principe destructeur et révolutionnaire en ce qui tient а la vie religieuse, qui dans le sphére de la politique à donné naissance au principe constitutionnel; j’ai démontré qu’une réforme fondamentale n’est possible qu’en tant qu’elle s’exercera simultanément dans les deux sphères de la philosophie et de la politique. Il se trompent а mon avis d’une manière dangereuse ces hommes d’Etat et ces meneurs qui presumént que le mode de pensée des peuples (c’est-а-dire leur philosophie) est une chose indifférente, et qu’une science sans prière n’entraоne pas aprus elle un qouvernement sans prière – cette ruine pour gouverneur et gouvernés… La Providence a tenu jusqu’а ce jour l’Eglise Russe en dehors de ce mouvement européen, dont l’effet à êtê de déchristianiser aussi bien la science que la société civile; et précisément parce qu’elle a défendu l’ancien catholicisme contre cex deux ennemis, le papisme et le protestantisme, parce qu’elle ne proscrit pas l’usage de la raison comme l’Eglise Romaine, sans laisser passage comme le protestantisme, aux abus qui en peuvent résulter, – elle seule est capable de se présenter comme médiatrice, ce qui du reste devra se faire par le seul secours de la science en Russie «par les Russes».