Том 4. Письма, 1820-1849 - страница 45

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Нессельроде К. В., 25 июля/6 августа 1838>*

44. К. В. НЕССЕЛЬРОДЕ 25 июля/6 августа 1838 г. Турин

Turin. Ce 6 août 1838

Monsieur le Comte,

J’ose me flatter que Votre Excellence voudra bien me pardonner l’importunité de cette lettre en faveur du motif qui me la fait écrire. J’ai appris par ma femme la sollicitude pleine de bonté que vous avez bien voulu lui témoigner dans un moment où des consolations lui étaient si nécessaires, et quelques personnels que fussent les titres, que sa position lui assurait à votre bienveillant intérêt, je n’en revendique pas moins une part dans la reconnaissance que nous vous devons. Je m’associe bien sincèrement à la satisfaction qu’elle éprouve à l’idée que c’est de vous, Monsieur le Comte, que lui sont venues les consolations les plus cordiales et les plus généreuses entre toutes celles qu’elle a reçues.

Ma femme m’a dit aussi que Votre Excellence ne s’est pas bornée à compatir à son malheur. Vous avez daigné, Monsieur le Comte, prendre connaissance des pertes matérielles, que ce désastre lui avait fait éprouver, et vous lui avez généreusement offert votre appui auprès de S M l’Empereur, pour l’aider à les réparer…>* Déjà les bontés de l’Empereur étaient venues la trouver, elle et ses compagnons d’infortune, presqu’au sortir du naufrage… Nous n’aurions, par conséquent, que des actions de grâce à rendre, sans nous permettre de nouveaux vœux: car un malheur subi par tant de monde ne saurait être un titre exclusif pour personne… Mais c’est à nos besoins, bien plus qu’aux droits que nous pourrions y avoir, que Sa Majesté se plaît à mesurer ses bienfaits, et jamais, je dois l’avouer, ses bontés ne m’ont été plus nécessaires. Car c’est au moment, où je me vois dans la nécessité de former un nouvel établissement, que j’ai perdu, d’un seul coup, tout ce qui pouvait me le faciliter. Réduit à mes propres ressources, ma position, je le confesse, serait infiniment pénible et embarrassante…>*

Que ne m’est-il permis de terminer ici cette lettre qui ne devait contenir que l’expression de ma reconnaissance. Car en vérité, Monsieur le Comte, je souffre de devoir ramener l’attention de Votre Excellence sur une question dont le plus grand tort est dêtre devenue une… C’est de cette malheureuse question de costume que je veux parler. J’en serais tout à fait inconsolable si j’avais eu le malheur de prendre l’initiative à ce sujet…>*

La cour, qui est absente en ce moment, rentre à Turin le 1>er du mois de septembre. C’est à cette époque que les personnes, arrivées ici dans l’intervalle, sont dans l’habitude de se faire présenter. Il serait difficile, surtout pour des personnes appartenant au corps diplomatique, une fois la cour revenue, de différer beaucoup leur présentation, car plus tard la cour va s’établir à Gênes où elle ne voit pas d’étrangers, et de cette manière l’époque de la présentation se trouverait indéfiniment ajournée. Je n’ignore pas qu’on s’occupe en ce moment chez nous d’un nouveau règlement qui aura pour objet de modifier le costume des dames, appartenant à la diplomatie russe, en leur imposant comme obligatoire à toutes les cours le costume national qui jusqu’à présent n’avait été que facultatif. Or, j’avais pensé à l’arrivée de ma femme qu’il serait peut-être convenable de mettre à profit la latitude, que laissait l’absence du nouveau règlement, pour l’engager à se faire présenter à la cour de Turin avec le costume qui y est en usage. Cette marque de condescendance, qui, venant de notre part, ne saurait, certes, avoir rien d’équivoque, me paraissait devoir être d’un bon effet sous plus d’un rapport. D’abord c’eût été une leçon de modération et de raison qui, pour être courtoise, n’en aurait pas été moins significative. Et plus, en convainquant la cour de Turin de nos dispositions conciliantes sur une question qui comporte si peu l’irritation et l’entêtement, elle aurait eu l’avantage de lui faire apprécier dans son véritable jour le nouveau règlement qui va paraître. Elle lui aurait prouvé que cette mesure du nouveau règlement était une mesure essentiellement générale, se rattachant à un ensemble d’idées parfaitement indépendant des circonstances du moment, ne recélant d’arrière-pensée d’hostilité contre qui que ce soit, et contre laquelle, par cons<é>q, il n’appartiendrait à personne d’élever la moindre difficulté ni d’articuler la plus petite objection.